Molly

Molly

Jeudi 26 août 2010 à 23:49

  
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  En haut, à droite de la vidéo, la date affichée correspondait au jour de l’enlèvement de Molly : 16.05.05. Les premières minutes montraient Margaret et Nora dans son landau, rentrant très probablement d’une promenade, tout ce qu’il y a de plus normal. Sur les images suivantes en revanche, on voyait Margaret, ouvrir une bouteille de whisky et s’en servir un verre, puis deux, puis trois, pour finalement boire à la bouteille. La jeune s’installa ensuite devant la télévision du salon, regardant le jeu télévisé diffusé sur une grande chaîne privée. Mis à part les quelques mouvements de Margaret, l’image resta fixe pendant près d’un quart d’heure.
  Puis tout d’un coup, elle se leva et sembla crier. Elle tituba complètement ivre jusqu’au landau. Elle prit Nora qui pleurait dans ses bras et tenta de la calmer par des gestes violents. D’abord en lui tapotant le visage puis en essayant de maintenir sa petite bouche de bébé fermée.
  Nora hurlait de plus belle tout comme Margaret qui finit par attraper sa fille à bout de bras et la secouer pour qu’elle se taise. Gregory, Mattew et Clarence ressentaient à ce moment là un profond malaise, comme si au fond d’eux, ils savaient déjà ce qui allait arriver. Le syndrome du bébé secoué. Tout le monde en avait entendu parler, de nombreux scandales déjà avaient éclaté, de nombreux bébés étaient morts…
  Les secousses s’intensifièrent jusqu’à ce que Nora arrête tout mouvement. Margaret parut ravie du silence qui régnait à nouveau dans son appartement, mais quand elle reposa sa fille dans son landau, elle sembla prendre conscience que quelque chose n’allait pas. Elle câlina Nora dans le but de la stimuler mais rien. Elle souleva ses paupières, posa sa tête sur son thorax dans l’espoir d’y percevoir un battement, mais elle était saoule, elle avait les oreilles qui sifflaient, elle était incapable de dire si sa fille était encore en vie.
  Elle courut vers le téléphone, composa un numéro, parla quelques secondes et raccrocha.
  Une dizaine de minutes plus tard, un homme apparut à l’image. Le sang de Gregory se glaça. Maxime se précipita vers le landau affolé, il examina Nora en tremblant, des larmes perlaient sur son visage. Il se dirigea vers la cuisine tout en parlant à Margaret qui s’effondra, elle ne cessait de pleurer, de hurler. Maxime fouilla les tiroirs et lorsqu’il trouva un sac poubelle, il y plaça le bébé.
  Il tenta ensuite de calmer Margaret, la serra dans ses bras pendant plusieurs longues minutes. La jeune femme finit par retrouver ses esprits et passa larmoyante un autre appel.
  Maxime s’éclipsa après avoir donné des cachets à Margaret et avoir attendu qu’elle s’endorme.
  Mattew passa en mode « avance rapide » jusqu’au moment où ils virent la jeune femme se lever du canapé et aller ouvrir la porte d’entrée. Ce fut alors au tour de Peter d’entrer en scène. De Peter et de Molly. Gregory avait eu envie de transpercer l’écran et de devenir lui aussi acteur, de stopper sa femme complètement folle et d’empêcher que ce drame ne vienne voler la vie d’une seconde petite fille.
Mais il assista impuissant à la scène.
  Peter donna Molly à Margaret qui semblait avoir évacué la plus grande partie de l’alcool qui circulait dans son sang et embarqua avec lui le sac poubelle.
  La suite n’avait rien de particulier, c’était sans doute ça le pire. La vie reprenait son cours comme si les épisodes des dernières heures avaient disparu.

Vendredi 27 août 2010 à 17:23

  

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  Dans l’appartement de Mattew et Clarence, la vidéo de la caméra de surveillance venait de s’arrêter mais les trois paires d’yeux étaient encore rivées sur l’écran de télévision. Ce qu’ils avaient vu était hallucinant mais pas que. C’était également effrayant. Voir une mère tuer sa propre fille et la remplacer par une autre, c’était plus qu’un crime, c’était une abomination. Gregory ne pouvait nier l’évidence, les images parlant d’elles-mêmes, son bébé était mort. Mort. Abattu par la main de sa douce et tendre, sa femme qu’il avait toujours connu pleine d’innocence et de naïveté, sa femme qui avait gardé son âme d’enfant jusqu’au jour où elle avait elle-même décider de se l’arracher, sa femme qu’il aimait. Sa femme qu’il ne connaissait pas.
  Clarence pleurait en silence, son mari était parti dans la cuisine pour dissimuler ses larmes et Gregory appela Molly qui jouait sagement dans la pièce d’à côté. Il prit la fillette dans ses bras et la serra le plus fort possible contre lui. Ses cheveux châtains sentaient le shampooing, un doux mélange entre l’abricot et la pêche qui l’apaisa. « Je t’aimerai toujours ma chérie. Toujours, je te le promets » susurra-t-il au creux de son oreille et Molly lui répondit en passant ses bras autour son cou.
  -Il faut que j’aille rendre visite à Tatie Alice, expliqua-t-il à la petite fille, tu vas rester ici avec les Smith, d’accord ? Je veux que tu sois sage avec eux.
  -Je vous accompagne. Déclara Mattew. Clarence veillera sur Mo… sur Nora. Se rattrapa-t-il.
  -Bien, on prend votre voiture dans ce cas.

  Respectant à moitié les limitations de vitesse et la signalisation, Mattew conduisit en suivant les indications de Gregory dont la rage montait au fur et à mesure qu’ils se rapprochaient du domicile des Metayer. Lorsqu’ils se garèrent devant la maison, Gregory constata avec une joie non dissimulée que la voiture de Maxime était dans le garage. Le détective ne prit pas la peine de sonner, il entra directement et chercha Maxime. Ce dernier se trouvait dans la cuisine, il lisait le journal et buvait son café.
  Quand il aperçut Gregory, il avala de travers et renversa sa tasse sur sa chemise. Il n’eut pas le temps de questionner le détective sur la raison de sa visite que celui-ci le plaqua contre le mur et plaça son avant-bras sous son cou. Maxime suffoqua jusqu’à ce que Mattew intervienne, le libérant de son étreinte.
  -Comment t’as pu faire ça ?! Hurla Gregory. Comment ?!
  -Je…Je ne sais pas de quoi tu parles. Prononça Maxime d’une voix tremblante.
  -Joue pas à ça avec moi Maxime ! On a tout vu bordel ! On t’as vu foutre Nora dans un sac en plastique ! Je te jure que si tu ne nous dis pas exactement ce qu’il s’est passé, je vais voir les flics. J’ai la vidéo de la caméra de surveillance installée chez moi, n’importe quel juge t’enverra en taule !
  Maxime tira vers lui une chaise et s’assit, larmoyant.
  -Un après-midi, Margaret a téléphoné à la maison, c’est moi qui ai décroché, elle semblait complètement paniquée, elle était incompréhensible, elle parlait tout en criant… Je lui ai demandé de se calmer, de m’expliquer la situation. C’est là qu’elle m’a avoué avoir secoué Nora pour la faire taire, elle m’a dit qu’elle ne bougeait plus, qu’elle ne savait pas quoi faire. Alors j’ai foncé chez vous dans un état second. J’ai vu Nora immobile dans le landau, il ne m’a fallu que quelques secondes pour la déclarer morte. Margaret était mon amie, elle m’a supplié de ne rien te dire, elle avait peur, elle savait que si tu étais mis au courant, tu t’enfuirais. Elle m’a parlé d’un homme qu’elle avait rencontré en Angleterre, un homme qu’elle savait prêt à tout pour de l’argent. Elle l’a appelé devant moi, lui a clairement fait comprendre qu’elle avait besoin d’un bébé d’environ deux mois. Il n’a pas cherché à décliner l’offre, il a dit qu’il prenait immédiatement un vol pour venir en France, qu’il avait déjà une idée de comment récupérer un nourrisson. Et puis je suis parti après avoir donné quelques somnifères à Margaret pour qu’elle dorme le temps qu’il arrive.
  -Et ensuite ! cria Mattew. T’as enlevé Molly avec Peter c’est ça ?!
  -Non. Répondit-il en baissant les yeux. Ensuite je suis rentré chez moi. Vers 18h, votre frère m’a appelé pour me dire qu’il avait remplacé Nora, par votre fille et qu’il avait enterré le bébé mort quelque part.
  -Où ?!
  -Je n’en sais rien je vous le jure…
  -Pourquoi tu ne m’as rien dit quand Margaret s’est tuée ?!
  -Parce que je risquais d’être rayé de l’ordre des médecins ! J’étais plus ou moins complice d’un infanticide ! Et puis Margaret m’avait fait promettre de ne jamais rien dire, elle avait été très claire, même si elle venait à disparaître un jour, je devais rester muet. Ce que j’ai fait, je l’ai fait aussi pour toi Gregory. Si tu avais su que Maggie avait tué Nora, tu aurais été anéanti…
  -Parce que tu crois que je ne le suis pas ?! Mattew, appelez les flics s’il-vous-plaît, qu’ils viennent arrêter ce connard.
  -Mais tu as dit que tu ne préviendrais pas la police ! supplia Maxime.
  -J’ai dit que je la préviendrais si tu ne parlais pas, je n’ai jamais dit que je ne la préviendrais pas si tu parlais.

  D’une démarche lente et lourde, Gregory rentra chez lui à pieds. A quelques rues de la maison de Maxime, deux voitures de police avec leurs sirènes hurlantes passèrent à toute allure devant lui. S’il avait pu, il aurait frappé Maxime jusqu’à ce que mort s’en suive, il l’aurait mis dans un grand sac poubelle et l’aurait enterré dans un bois. La rage qu’il avait toujours en lui s’extériorisa dans son appartement. Il renversa des meubles, cassa de la porcelaine, c’était complètement futile, il le savait, mais à ce moment précis, il n’avait pas à jouer à l’homme fort et raisonnable. Quand toutes les assiettes se retrouvèrent sur le sol, il se stoppa net, observa son propre désastre et ne sembla en tirer aucune satisfaction. Alors il courut dans sa chambre et revint dans le salon avec la boîte à musique de Margaret. C’était la dernière chose qu’il avait gardé d’elle. La première année, il avait conservé tous ses vêtements, pour pouvoir disait-il « respirer son odeur ». Mais ses habits avaient progressivement perdu cette odeur tant désirée pour ne plus sentir que le renfermé. Alors il avait tout donné à une association caritative.
  La boîte à musique dans les mains, il leva les bras le plus haut possible et la jeta par terre de toute ses forces si bien que la moindre cellule de ses muscles n’était plus destinée qu’à une tâche : réduire en mille morceaux l’ultime bien de la défunte, de la tueuse.
  La petite danseuse au centre émit sa douce mélodie dans le vide, quand sous la pression de l’air la boîte s’était ouverte. Puis quand le bois noir vint percuter le parquet, éclatant en nombreux fragments qui se disséminèrent dans un rayon de quatre mètres dans le salon, elle fut décapitée. L’alliance de Gregory roula sous le canapé comme pour éviter que le jeune homme ne décide de la détruire elle aussi.
  Il se pencha pour ramasser les débris et vérifier que malgré le fait que la majeure partie du bois soit restée soudée, la boîte était inutilisable.


  Jamais deux sans trois. Derrière le velours rouge déchiré, un papier semblait avoir été caché. Jamais deux sans trois. Gregory passa son doigt dans le trou du tissu pour l’extraire. Jamais deux sans trois. C’était une feuille pliée en quatre. Jamais deux sans trois. Lorsqu’il l’ouvrit, une photo tomba à ses pieds. Jamais deux sans trois. On y voyait une petite fille allongée sur un lit. Jamais deux sans trois. Gregory lu les quelques mots qui étaient inscrits sur la feuille. Jamais deux sans trois. « Nora, Mars 2007, île de Batz, Bretagne ». Jamais deux sans trois. La fillette sur la photo n’était pas Molly. Jamais deux sans trois. La vie de Gregory avait déjà basculé deux fois. Elle venait de le faire une troisième.

Samedi 28 août 2010 à 15:27

  

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  Gregory tenait la photo entre ses doigts et essayait de comprendre. Margaret était morte le 20 Mars 2007, la petite fille sur la photo n’était pas celle qu’il avait élevée. Se pourrait-il que ce soit la vraie Nora ? C’en était trop pour lui, il était détective certes mais tous ces rebondissements lui faisaient perdre la tête, il ne savait plus à quoi, à qui se fier. Alors il prit la plus des sages des décisions, ce qu’il aurait du faire il y a quelques jours, lorsque Mattew lui avait amené sur un plateau la piste de Peter. Il se rendit au commissariat.

  Mattew qui était déjà sur place avait détaillé toute la situation aux agents de police qui venaient de l’interroger. Maxime avait reconnu tous les faits qui lui étaient reprochés, c’était maintenant au tour de Gregory d’entrer en scène.
  Il lança sans un mot la photo sur le bureau du policier. Ce dernier connaissait bien Gregory, pour avoir déjà tenté en vain de le raisonner sur ses méthodes parfois douteuses en matière d’investigation. Il regarda la photo attentivement puis demanda à Mattew en la plaçant sous ses yeux :
  -C’est votre fille Molly ?
  -Non, je… bredouilla-t-il en jetant un regard incompréhensif à Gregory, je ne sais pas qui est cette petite fille !
  -Je l’ai trouvée dans les affaires de ma femme, expliqua Gregory, elle était cachée dans une vieille boîte à musique. Elle était accompagnée d’un papier où il y a simplement écrit « Nora, Mars 2007, île de Batz, Bretagne ».
  -Vous pouvez confirmer qu’il ne s’agit pas de Molly ?
  -Evidemment, je n’ai peut-être pas vu ma fille jusqu’à ses quatre mois mais ensuite j’étais là, je peux vous montrer des photos de No… de Molly à deux ans. Et puis quel intérêt aurait eu Margaret à cacher cette photo si c’était bien Molly dessus ?
  -Qu’en déduisez-vous ?
  -Je…
  Mais il fut coupé par Alice qui lui sauta au cou. Apparemment la jeune femme avait été mise au courant de l’arrestation de son mari et semblait effondrée.
  -Je suis désolée Gregory, si tu savais, tellement désolée, dit-elle en pleurant, Maxime était paniqué, il ne savait pas quoi faire.
  -Tu étais au courant ?!! cria-t-il en la secouant.
  -Je…
  -Tu étais au courant et tu ne m’as rien dit !
  -Maxime m’a tout avoué le jour où Margaret est morte, il était atterré… Bien sûr que j’ai d’abord pensé à t’en parler, mais en y réfléchissant, je n’avais pas la force de briser le silence. Trop de personnes en auraient souffert : Toi pour commencer et puis Molly, Nora,…
  -Nora !! répéta-t-il en plongeant ses yeux dans les siens. Tu parles de ma fille, ma vraie fille ?
  -Je… non…enfin…qu’est-ce que…qu’est-ce Maxime vous a dit ? bafouilla-t-elle.
  -Il nous a dit qu’elle était morte ! Alice bon sang ! Si tu sais quelque chose parle ! Tu es complice d’un enlèvement même si tu n’y as pas participé, tu vas être jugée, et je suis persuadé que rétablir la vérité pourra jouer en ta faveur lors de ton procès. N’est-ce pas ?
  -Votre ami a raison, affirma le policier, vous pourriez certainement réduire votre peine.
  Alice hésita quelques instants puis, tout comme l’avait fait son mari plutôt dans la matinée, elle tira une chaise vers elle, s’assit et raconta tout ce qu’elle savait.

  -Le 16 mai 2005, à 18 heures, Peter a téléphoné à Maxime, alors qu’il creusait un trou pour y enterrer Nora, le sac poubelle qu’il avait placé près de lui s’était mis à bouger. Il l’avait rouvert et avait constaté que Nora respirait, qu’elle bougeait ses petits doigts… Il ne savait plus quoi en faire, il ne pouvait pas la rendre à Margaret, elle avait déjà un nouveau bébé et il ne pouvait pas rendre ce nouveau bébé à ses parents… c’était impossible, trop risqué… Il voulait que Maxime l’aide à s’en sortir. Mon mari a accepté, ils se sont rencontrés dans le cabinet de Maxime à l’hôpital. Nora semblait en forme, il l’examina et ne constata pas de dégâts apparents. Il ne s’explique toujours pas comment il a pu croire que Nora était morte. Je pense qu’il était paniqué, qu’il ne savait pas vraiment ce qu’il faisait… Toujours est-il que Nora était bel et bien en vie et qu’il fallait trouver un moyen de la cacher. Alors il l’a amenée chez ses parents en Bretagne…
  -L’île de Batz… murmura Gregory qui semblait reconstruire les morceaux du puzzle au fur et à mesure que les mots sortaient de la bouche d’Alice.
  -Oui, sur l’île de Batz… reprit-elle. Ses parents y possèdent une petite maison perdue au milieu des rochers. Il l’a laissée là-bas. Ses parents étaient au courant de tout, ils ont accepté sans hésiter de garder Nora avec eux. Ils se sont occupés d’elle, l’ont nourrie, éduquée… Maxime lui rendait visite tous les six mois. A un an et demi, la fillette a montré des symptômes étranges : elle était tout le temps fatiguée, dormait mal, vomissait fréquemment… Maxime s’inquiétait alors il a fait faire des tests : prise de sang, test d’urine… Et il s’est avéré qu’elle souffrait d’une insuffisance rénale à un stade plutôt avancé. Il a alors installé un système de dialyse chez ses parents, vous savez, une sorte de machine pour filtrer le sang… Il savait que cette solution n’était que provisoire, qu’elle aurait tôt ou tard besoin d’un nouveau rein… Mais il ne pouvait pas l’inscrire sur une liste d’attente dans le but de recevoir un greffe, elle n’avait pas d’identité officielle, pas de parents, pas d’acte de naissance, aucune assurance… Son dernier espoir, c’était Margaret. Le 20 Mars, il a demandé à Margaret de venir à la maison et lui a tout expliqué : que sa fille avait besoin d’elle, qu’il fallait qu’elle accepte de lui donner un de ses reins… Mais Margaret n’y croyait pas, alors il lui a montré la photo… Maggie est devenue folle de rage, elle disait qu’elle ne pouvait pas, qu’elle avait sa famille, que la petite fille sur la photo n’était pas Nora, que sa Nora à elle, elle était là, assise par terre. Alors il l’a poussée violemment contre le mur pour lui faire entendre raison mais elle ne voulait rien savoir. Nora s’est mise à hurler, je pense que c’est cet épisode qu’elle a gardé en mémoire, elle doit penser que Maxime a tué sa maman, sans se souvenir de son visage…
  Elle s’arrêta quelques secondes pour reprendre sa respiration.
  -Elles sont rentrées chez elles et quelques heures plus tard, tu téléphonais en larmes pour nous dire que Margaret s’était donné la mort. C’est là qu’il m’a tout raconté…
  -Est-ce que Nora…
  -Oui, le coupa-t-elle, oui, Nora est toujours en vie. Nous avons mis quelques semaines à nous remettre de la disparition de Margaret et puis il nous a fallu réfléchir au moyen de sauver Nora. Son état se détériorait de jour en jour, si nous ne faisions rien, elle allait s’éteindre à petit feu. Nous avions effectué des tests afin de déterminer si lui ou moi étions compatibles avec Nora. Mais les résultats étaient négatifs. Finalement, c’est Maxime qui a trouvé comment on allait s’en sortir. Un matin, alors qu’il était entré en salle d’opération pour greffer le rein d’un mort à un petit garçon, il constata que le rein en question aurait pu sauver la vie de Nora. Tout correspondait, c’était le rein parfait. Alors juste avant que son équipe n’ouvre l’enfant, il expliqua qu’il y avait un problème avec le rein, qu’il était complètement abîmé, que l’opération ne pouvait pas avoir lieu. Et il fit clandestinement venir Nora dans son hôpital le jour-même et lui greffa le rein. C’était en Novembre 2005. Depuis, Nora est en parfaite santé.
  -C’est tout ce que vous avez à nous dire ? demanda l’agent. Rien d’autre à ajouter ? C’est le moment, après il sera trop tard.
  -Le jeune homme que tu as rencontré dans le TGV, dit-elle en se tournant vers Gregory qui avait le regard dans le vide, Florian, Maxime l’avait engagé pour te suivre et tuer Peter si tu le retrouvais…
 
  Gregory alla s’aérer dehors. Au cours de ses deux dernières semaines, sa vie avait pris une tournure inattendue, les questions s’étaient multipliées et aujourd’hui, elles venaient de toutes trouver leur réponse. Il ne savait plus s’il devait être heureux ou triste, d’ailleurs il ne ressentait plus rien. Il n’était focalisé que sur une chose, rencontrer Nora.

Dimanche 29 août 2010 à 17:25


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  La police bordelaise avait décidé de se rendre en Bretagne le lendemain afin de rendre Nora à son père. Mais avant que le détective ne ramène la fillette, Mattew, Clarence et lui avaient décrété qu’il était temps pour eux d’expliquer la situation à Molly.
  -Nora chérie, avait commencé Gregory, il y a quelque chose dont il faut que je te parle. Il ne faut pas que tu aies peur, tout se passera bien, d’accord ?
  La petite fille acquiesça.
  -Bon je me lance, déclara-t-il à Mattew et Clarence assis en face de lui, ton vrai prénom ce n’est pas Nora, en réalité tu t’appelles Molly, et tout comme toi j’ai été très très surpris en l’apprenant ! dit-il en la voyant écarquiller les yeux.
  Il n’était pas question qu’elle apprenne la vérité alors il récita ce qu’ils avaient tous les trois convenu de lui dire.
  -Il se trouve en fait que dans l’endroit où il y a tous les petits bébés, il y a eu une erreur lorsque tu es née. On a donné à ta maman et à moi le bébé d’un autre couple, tu comprends ? Je ne suis pas ton vrai papa et maman n’était pas ta vraie maman. Non, en fait tu es la petite fille de Clarence et de Mattew.
  Molly jeta des regards interrogateurs à ses parents biologiques qui tentèrent de lui sourire pour dissimuler leur angoisse.
  -Le bébé de papa et maman, il a été pris par un méchant monsieur qui l’a caché, mais maintenant, la police l’a retrouvé. Et demain, je vais aller chercher ce bébé qui a grandi et est devenu une grande fille comme toi.
  -Tu m’aimes plus alors ? demanda Molly complètement perdue.
  -Si, bien sûr que si ! Je t’aimerai toute ma vie, tu seras toujours ma petite Nora dans mon cœur. Mais tu dois comprendre que tu as des parents qui t’aiment aussi énormément. Avec le temps, tu vas apprendre à les connaître et tu verras que toi aussi tu les aimeras.
  Molly éclata en sanglots, et Gregory la prit dans ses bras pour sécher ses larmes alors que les siennes ainsi que celles de Clarence et Mattew avaient aussi commencé à couler.
  -Tu as le droit d’être triste chérie, c’est tout à fait normal, c’est difficile pour toi, mais je te promets que dans quelque temps, tu seras très heureuse.
  -Je pleure pas pour moi, je pleure pour la petite fille. Dit-elle en passant la paume de sa main sur ses yeux.
  -La petite fille ? s’étonna Gregory.
  -Oui, elle, elle a jamais eu de papa et de maman pour l’aimer.
  Les trois adultes rirent alors aux éclats. La phrase n’avait rien de comique en elle-même mais elle montrait que Molly avait compris tout ce qu’ils avaient voulu lui expliquer et qu’elle n’était pas si malheureuse qu’elle aurait pu l’être. Entendre une enfant se lamenter sur le sort d’une autre, c’était le signe qu’il restait encore un peu d’humanité dans ce monde, et après tout ce qu’ils venaient de vivre, ils accueillaient ça comme un miracle.
  Seize heures le lendemain, après un long trajet en voiture, Gregory et les deux agents qui l’accompagnaient étaient arrivés à l’embarcadère qui assurait la liaison entre l’île de Batz et le continent. Sur le bateau, parmi la foule de touristes insouciants, Gregory ressemblait à un Ovni, le visage pâle, le regard au loin. Plus ils s’approchaient, plus le cœur de Gregory battait fort dans sa poitrine, il était impatient de rencontrer sa fille mais il avait aussi peur, peur de la réaction de la fillette. Lorsqu’ils arrivèrent devant la maison des parents de Maxime, il avait inconsciemment voulu faire demi-tour, il avait voulu s’endormir, et se réveiller deux semaines en arrière, retrouver sa vie d’avant. Mais il entendit des rires d’enfants qui provenaient du jardin. Il contourna la bâtisse en pierre et…

  … et c’est là qu’il la vit.
  … et c’est là qu’elle le vit.

  -Bonjour monsieur, déclara-t-elle avec toute son assurance, je m’appelle Nora !
  -Bonjour… répondit Gregory ému.
  -Vous voulez jouer avec moi ? Adrien et Elen ils sont toujours occupés alors ils ne veulent jamais jouer avec moi…
  -Je… Oui, pourquoi pas.
  La fillette prit alors sa main et le conduisit à quelques mètres de là, au pied de la mer. Elle portait une marinière, un petit short bleu foncé et des bottes en caoutchouc jaune, deux fois trop grandes pour elle. Ses cheveux châtains clairs étaient soulevés par la brise et Gregory put sentir que ses mains étaient couvertes de sable.
  -Vous devez m’aider à trouver des petits cailloux. Des jolis hein ! C’est pour mettre dans l’aquarium de Bubulle. Bubulle c’est mon poisson rouge, il faudra que je vous le présente, dit-elle tout en fouillant le sable.
  -Adrien et Elen, ce sont tes parents ? se risqua à demander Gregory en s’accroupissant pour imiter sa fille.
  -Non, eux ils s’occupent juste de moi. Mon papa et ma maman, je ne les ai jamais vus. Mais Adrien et Elen, ils ont dit qu’un jour ils viendraient me chercher. Des fois la nuit, je rêve qu’ils sont là et puis le matin quand je me réveille, je suis toute triste.
  Gregory prit alors les deux mains de Nora et plongea son regard dans le sien. Sa fille avait exactement ses yeux, ils étaient exactement du même bleu, comme le bleu de  l’immense étendue d’eau qui se trouvait devant eux.
  -Nora, je suis venu te chercher. Prononça Gregory lentement comme pour savourer l’instant.
  -Vous… vous êtes mon papa ? bafouilla-t-elle.
  -Oui, je suis ton papa. Répondit-il en souriant comme jamais il n’avait souri.
  Nora se jeta alors à son cou. Gregory se leva et la fit tournoyer avec lui. Il était heureux. Ils étaient heureux.

Dimanche 29 août 2010 à 18:08


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  -Joyeux anniversaire, joyeux anniversaire, joyeux anniversaire Louane, joyeux anniversaire !!!
 
  Dans une immense propriété au bord de la méditerranée, une petite fille soufflait ses dix bougies.
  -Tu as fait un vœu j’espère ! s’exclama Gregory.
  -Bah oui, évidemment ! répondit-elle à son père. Je peux avoir mes cadeaux maintenant ? demanda-telle impatiente.
  -Oui vas-y !
  Louane se précipita alors sur la montagne de paquets colorés.
  -Celui-ci, c’est de ma part ! expliqua Molly.
  Il s’agissait d’un petit cœur en pendentif qu’elle s’empressa d’attacher autour de son cou.
  -Merci ! dit-elle en la prenant dans ses bras.
  -Et ça, c’est de la part de Clarence et moi. fit Mattew en posant sur le sol un énorme carton.
  -Waaa ! Un aquarium géant ! T’as vu papa ! Je vais pouvoir mettre encore plus de poissons dedans !
  -Tu ne trouves pas qu’elle en a déjà assez des aquariums ? murmura Gregory à Mattew. Sa chambre en est déjà remplie…
  -Bah, on mettra celui-là dans le salon !

  Lorsqu’il était rentré avec Nora, cinq ans auparavant, Mattew et Clarence lui avait fait une proposition en or. Ils ne souhaitaient pas séparer Molly de Gregory, alors ils avaient décidé d’acheter une villa sur la côte d’azur pour y vivre tous ensemble. La cohabitation s’était mise en place très rapidement et depuis, tout se déroulait à merveille, Gregory avait choisi d’appeler Nora Louane pour ne plus créer de confusion et Molly et elle se considéraient comme de véritables sœurs.

  Soudain, alors que toute la petite tribu était attablée, en train de dévorer le fraisier, Clarence se mit à pousser des cris.
  -Mattew, brailla-t-elle, je crois que… je crois que le bébé arrive !!
  -Ok ! Répondit ce dernier dans un état second. Surtout, pas de panique ! Louane, Molly, vous restez avec Gregory, moi, j’emmène Clarence à la maternité ! Molly, chérie, vas me chercher le sac que maman a préparé, il est dans la chambre.

  Lorsque Molly rapporta le sac, Clarence et Mattew montèrent dans la voiture.
  -On pensera à toi Clarence ! fit Gregory.
  -Ouais ! confirma Louane. Et essayez de ramener le bon bébé à la maison cette fois.

  Et ce fut sous des éclats de rires que la voiture s’éloigna.

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